Un grand pas vers l’autonomie

Tout est dit dans le titre. Cela fait maintenant quelques jours que je suis capable de me promener dans la rue en donnant la main à Maman.

Jusqu’ici je me promenais uniquement en poussette. Je refusais de donner la main et de marcher. Je m’allongeais par terre, je courrais partout et surtout je ne comprenais rien aux consignes de Maman.

Aujourd’hui, je ne comprends pas pourquoi je dois donner la main mais je le fais machinalement et je marche en émettant des bruits ou en tétant ma tétine. Je suis très passif, je suis le mouvement et vais où on me demande d’aller. Maman pense que je ne me rends même pas compte quand on arrive dans un magasin. Ma sœur réclame immédiatement du pain ou des gâteaux et moi je passe dans le rayon et j’ai la même expression qu’hors du magasin.

Je suis passif, je me laisse promener et ne réagis pas. Maman est fière de moi et de mes progrès, même petits. Cela lui change la vie d’avoir une petite poussette pour ma sœur seulement mais elle est un peu triste quand elle voit l’expression de mon visage et ma passivité face à l’environnement que je rencontre lors de mes promenades. Je suis indifférent à un chien qui passe, par contre s’il y a un caillou qui dépasse du bitume cela déclenche chez moi une crise car dans mon esprit, tout doit être en ordre, aligné et rangé, mais rien ne vit.



L’album de ma famille

Les enfants comme moi ne pointent pas du doigt. L’absence de pointage vers 18 mois est d’ailleurs un des symptômes parmi d’autres de l’autisme. Pour m’aider à pointer, Maman a créé un album réservé à ma famille. Maman a relié 5 feuilles de papier. Une page est réservée à un membre de ma famille. Sur chacune d’elle Maman a mis une photo de la personne concernée.

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Je suis très intéressé par les photos. Maman prend mon index et désigne en me guidant la personne de la photo et dit son nom. Elle me fait également le signe en Makaton.

Pour diversifier l’utilisation de ce livre, je peux aussi, sous forme de loto, reconstituer les prénoms en mettant les étiquettes au bon endroit.

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Ce travail m’aide à associer mes babillages à une personne. En effet, je dis « papapa » et « mamama » mais pas toujours à propos. Quand Maman me désigne sa photo et qu’elle dit « maman », cela m’aide à utiliser correctement le langage.



La famille va s’agrandir

Tout est dit dans le titre. Nous attendons un heureux événement pour l’été prochain. Xavier va encore voir sa fratrie s’agrandir. Je sais que beaucoup de lecteurs seront étonnés par cette nouvelle. Certains diront « quel courage ! », et d’autres « ils sont fous » ou encore « ils ont déjà une enfant handicapé et cela ne leur suffit pas ». Aujourd’hui, la différence m’a appris à être indifférente. A cause de l’autisme, nous avons dû renoncer à plein de choses : ma vie professionnelle, les vacances en famille, les sorties culturelles ou sportives, la vie en couple et plein d’autres choses encore. Je ne voulais pas renoncer à mon rêve de famille nombreuse. Je sais que je prends le risque d’avoir un autre enfant autiste, mais si c’est le cas je l’aimerai et l’aiderai comme je le fais avec mes autres enfants.

Je crois que mes enfants me donnent la force d’aider Xavier, et ils l’aident beaucoup aussi. Quand il faut aller au bain, son frère et sa sœur lui prennent chacun une main pour aller dans la salle de bains. En plus, ils le stimulent car ils veulent jouer avec lui et les progrès de Xavier dans la fratrie sont phénoménaux. Avant, il était indifférent à leur présence. J’avais l’impression qu’il ne se rendait pas compte qu’il n’était pas seul dans la pièce. Aujourd’hui, il court pour se faire attraper et regarde sa sœur qui lui apporte son doudou et lui sourit. C’est beau pour une maman de voir la solidarité qui naît entre eux : Blanche, qui a 18 mois, ramène toujours ses chaussures et celles de Xavier quand je lui dis qu’on va sortir.

J’ai la chance d’avoir deux enfants normaux et leurs sourires, leurs regards , leurs paroles m’aident à oublier et à supporter tout ce que Xavier ne me donne pas.

Je comprends aussi les mamans qui s’arrêtent après la naissance d’un enfant handicapé car c’est dur et frustrant et on a peur que ça recommence. Mon mari me dit que l’on porte déjà notre croix et que l’on en aura pas une deuxième. Moi, je ne suis pas si sereine, je me prépare à tout et je n’ai plus l’insouciance que j’avais quand j’ai eu mon premier.

Quand on a un enfant différent, la vie est compliquée, rien n’est simple mais on apprend à apprécier les choses simples de la vie. Mon bonheur actuel, c’est au sein de ma famille au sens strict que je le trouve, alors je voulais faire croître ce bonheur. Je me dis aussi que quand je ne pourrai plus gérer Xavier ils seront plusieurs à pouvoir prendre le relais.



Les renforçateurs

Les enfants autistes comme moi ont la particularité d’avoir des intérêts restreints et surtout des obsessions. Il est alors difficile de nous faire travailler, car si au moment « t » ce qui nous intéresse c’est notre ligne d’animaux, ou la tapisserie de notre chambre, ou encore un livre nous ne voulons pas venir nous asseoir à table. Finalement, les enfants neurotypiques sont pareils puisqu’ils ont aussi tendance à rester à leurs occupations plutôt que de venir faire ce que l’adulte leur demande. Avec ces enfants dits « normaux » qui comprennent le langage parlé, on utilise le chantage. : « Viens faire ton coloriage et après tu auras tes petites voitures ou tu retourneras jouer… »

Avec moi, le chantage est impossible car je ne comprends pas les longues phrases de Maman. Cependant, il a été nécessaire de trouver une solution pour m’aider à venir de moi-même m’asseoir à table pour réaliser un exercice ou travailler un apprentissage. Pour cela, Maman utilise des renforçateurs. Il s’agit d’un objet qui me plaît et qui va attirer mon regard et ainsi me permettre de me diriger à l’endroit voulu. On peut critiquer cette démarche en disant que l’on ferait de même avec un animal qui voudrait son os, mais on a rien sans rien.

Ainsi, si Maman enlève ma tétine de ma bouche et l’amène sur la table et qu’elle me demande de m’asseoir pour la récupérer, je semble exécuter son ordre, m’asseoir et me préparer à travailler. Le plus dur c’est de trouver des renforçateurs, c’est-à-dire des objets qui vont m’intéresser au point de quitter mon obsession (ma ligne d’animaux) ou d’arrêter ma crise (parce que justement Maman a rangé les animaux pour me permettre de me concentrer sur une tâche précise).

Mes intérêts sont très restreints et en plus changeants. Maman doit alors sans cesse renouveler son stock de renforçateurs. Il y a la pâte à modeler, la tétine, les gâteaux et certains livres. Mais pour que le renforçateurs soient sources de motivation, il faut que je comprenne le lien entre la tâche à effectuer et le résultat que je vais pouvoir obtenir en cas de réalisation.

C’est une sorte de récompense, mais pour moi c’est très dur à comprendre car au même titre je ne comprends pas quand Maman me gronde ou qu’elle n’est pas contente. Je ne fais pas le lien entre son attitude et mon acte. De même, si elle gronde mon frère ou ma sœur je le prends pour moi et je pleure.

En tous cas le système de renforçateurs même s’il est critiquable est très utile pour mettre en place un emploi du temps : on peut mettre la photo de deux activités et la troisième celle de la pâte à modeler (le renforçateurs) ce qui aide la pensée à se construire. Je semble mieux comprendre le chantage de Maman ce qui évite les crises. Par exemple, quand la psychologue arrive je sais que Maman range mes animaux et quand c’est fini, Maman revient avec.

Les renforçateurs sont également nécessaires pour développer la communication chez les enfants autistes. En effet, il ne risque pas de demander un objet pour lequel il n’a aucune affinité comme tout enfant d’ailleurs. Si on veut qu’il demande quelque chose, cette dernière doit vraiment l’attirer.

Voilà encore un petit moyen que Maman utilise pour me stimuler, me motiver et m’aider à grandir. La première étape pour aider un enfant autiste à progresser c’est d’établir une liste des renforçateurs que l’on peut utiliser pour réduire les crises signes visible de leur incompréhension du monde. Par exemple, quand je suis dehors, Maman met Dora à la télé pour que je rentre : quand j’entends le générique, j’accours et Maman ferme la porte et s’épargne la crise qui accompagne le moment de rentrer. Au fur et à mesure, je comprends que quand Maman me montre la carte de Dora je dois rentrer. De même quand elle m’arrache ma tétine et la pose sur mon bureau : je m’assois. Je fais ainsi petit à petit le lien entre ce que dit Maman et l’action que je dois faire.

Les enfants autistes comme moi sont plus attirés par les objets que par les sujets, alors il est indispensable de se servir de ce déséquilibre pour rétablir l’équilibre et ainsi nous faire accéder à votre monde.



Algorithme

Pour moi, il est très difficile de travailler les algorithmes car mon esprit est très organisé et j’ai tendance à tout trier… par couleur. Alors, me demander d’alterner deux couleurs est inconcevable, car sur une même ligne, si j’ai 3 pions rouges et 3 bleus, je les dispose par série de couleurs.

Pour m’apprendre, Maman a décidé de me forcer à manipuler. Je suis encore petit et les gommettes c’est un peu abstrait pour moi et peu ludique. Après avoir utilisé diverses fantacolors, elle a enfin trouvé celui qui attirait mon attention : premier pas important pour mes progrès. En effet, je vais déjà devoir changer ma façon de raisonner, alors si en plus je dois utiliser de force un matériel qui ne me plaît pas cela ne va pas m’aider à progresser.

Maman a utilisé ce fantacolor : au lieu d’enfoncer les pions, il faut les encastrer, ce qui est plus simple, mais l’idée de construire me plaît aussi.
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Au début, Maman m’a laissé libre d’utiliser le matériel comme je le souhaitais. Elle me connaît bien car si vous lui aviez demandé de prédire le résultat elle ne se serait pas trompé. Comme c’était prévu j’ai tout trié par couleur.
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Ensuite, Maman, avec beaucoup de guidance et de patience, m’a montré comment faire des lignes en alternant deux couleurs. Elle disait juste le nom de la couleur et on encastrait. A la fin, elle me donnait le pion et je le posais correctement. Si je me trompe elle me dit : »non » , enlève le pion et me montre où le mettre avec son doigt.

Enfin, j’ai essayé de faire des algorithmes seul. Tout d’abord, Maman ne m’a laissé dans le pot que les deux couleurs dont j’avais besoin. Puis, elle a mis les trois premiers pions toujours en nommant les couleurs. Ensuite, elle me disait le nom de la couleur et je posais le pion. A son grand étonnement, j’ai vite compris. En cas d’erreur, elle dit : « non », enlève le pion et me désigne dans la boîte la couleur à poser.

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Et voilà ce que ça donne.

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